Calculer l’index d’égalité femmes-hommes : pas si simple !
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Depuis le 1ermars 2019, les entreprises de plus de 1000 salariés sont tenues de publier leur index d’égalité femmes-hommes : une note sur 100 que les ETI et grandes PME devront, elles aussi, bientôt être capables de calculer. Un sujet plus complexe qu’il n’y paraît, pour lequel les DRH sont encore peu accompagnés
Dans le cadre de la loi Avenir professionnel de 2018, le décret d’application relatif à la publication de l’index d’égalité femmes-hommes est paru le 9 janvier dernier, ne laissant que quelques semaines aux grandes entreprises pour s’organiser. La moitié d’entre elles, d’ailleurs, n’a pas réussi à sortir sa note dans les temps selon Muriel Pénicaud. De leur côté, les éditeurs SIRH ne se sont pas vraiment emparés de la question, mobilisés par d’autres priorités comme le prélèvement à la source.
« L’égalité salariale est un sujet sur lequel nous avions commencé à travailler. Un cabinet nous accompagnait déjà lorsque ce projet d’index a été annoncé. Il nous a aidé sur le plan méthodologique. En revanche, nous avons fait nous-mêmes des extractions dans notre système de paie SAP. Nous avons ensuite retravaillé nos données sur Excel avec des macros », témoigne Nadir Kadji, DRH de Metro France. Résultat : un score de 93 % pour le grossiste, bien au-delà des 75 % minimum requis. L’index est basé sur cinq critères, dont l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes (qui compte pour 40 points), l’écart de répartition des augmentations individuelles et des promotions.
Des difficultés et des biais
Les entreprises de 250 salariés et plus devront être prêtes à dégainer leur index à compter du 1erseptembre prochain tandis que celles d’au moins 50 salariés ont un répit jusqu’au 1er mars 2020. Reste que le calcul n’est pas une mince affaire. Principale difficulté selon Metro : dompter les bases de données. « Dans notre système, nous n’avions pas deux champs distincts pour les augmentations qui font suite à une promotion et celles liées à une campagne de négociation annuelle obligatoire, par exemple, ce qui oblige à retravailler à la main », explique Nadir Kadji. Par ailleurs, faute de temps pour produire une classification ad hoc, l‘entreprise a repris celle de sa convention collective. « Un cadre en informatique et un cadre de secteur en entrepôt n’ont pas les mêmes niveaux de rémunération, indépendamment de leur genre. Pourtant, ils appartiennent à la même classe. On peut être amené à comparer des choux et des carottes », admet le DRH. Un chantier qu’il compte retravailler pour améliorer la classification et automatiser le calcul d’ici l’an prochain. « Le but est d’être fin dans l’analyse… pas de trouver des moyens de détournement pour avoir une bonne note », insiste Nadir Kadji.
Les mathématiques à la rescousse ?
Le spécialiste des algorithmes d’optimisation Eurodécision travaille sur le sujet depuis plusieurs années, notamment avec son client Valéo, avec qui il a développé un modèle mathématique de détection des différences de salaire entre les hommes et les femmes. « Se baser uniquement sur des moyennes contribue à gommer les facteurs explicatifs des écarts de rémunération. Le calcul doit prendre en compte la planification, les métiers, les compétences, voire le dossier des salariés », explique Ronan Bars, directeur général de ce cabinet historique, pionnier en matière d’intelligence artificielle. En réalité, l’éditeur ne soulève pas seulement la question de l’égalité de salaire en fonction du genre, mais aussi celle de l’équité salariale. « Dans certaines entreprises, travailler 24 heures le week-end génère la même rémunération que travailler 35 heures en semaine », rappelle-t-il. Ainsi, à partir du SIRH et du logiciel de paie, Eurodécision collecte et analyse les données selon plusieurs critères pour détecter les écarts et mesurer les facteurs d’influence des différences de salaire. Objectif : proposer un plan d’action « neutre », avec des mesures correctives.
Gaëlle Fillion