« L’IA générative est déjà entrée dans le quotidien des professionnels RH »
Dans un contexte d’accélération technologique, les RH doivent se réinventer. Responsable marketing produit chez Cegid, Flora Brousse passe en revue les bouleversements en cours, les nouvelles attentes des collaborateurs et le rôle stratégique que peut jouer l’IA, à condition de s’inscrire dans des usages concrets et responsables.

La transformation des RH est un sujet récurrent depuis plusieurs années. Qu’est-ce qui change vraiment aujourd’hui ?
Ce qui change aujourd’hui, c’est l’ampleur de la rupture technologique. Je ne parle plus seulement de digitalisation mais aussi d’intelligence artificielle.
Les professionnels RH doivent adapter leurs pratiques s’ils veulent rester en phase avec les attentes de leurs collaborateurs, en particulier les jeunes générations.
D’une part, ces derniers attendent des environnements plus inclusifs et flexibles (avec le télétravail) et, d’autre part, des outils RH simples et fluides (poser facilement une semaine de congé ou suivre une formation depuis son smartphone).
Et puis, il y a aussi la pression réglementaire : en France comme en Europe, les évolutions sont rapides, qu’il s’agisse de confidentialité des données ou d’encadrement de l’usage de l’IA dans les processus RH. Cela implique pour les équipes RH une veille permanente et une capacité d’adaptation continue.
Justement, quel regard portent les responsables RH sur l’IA et l’IA générative ?
Il y a une vraie curiosité. Ils sont prêts à en explorer le potentiel mais… avec prudence.
Dans une étude Cegid récente menée conjointement avec IDC, une majorité de responsables RH souhaite adopter des solutions intégrant de l’IA générative. En effet, 81 % des dirigeants font confiance à l’intelligence artificielle générative pour transformer leurs processus RH (Dataiku, 2025). Sauf qu’il existe de fortes disparités selon la taille des entreprises : plus l’entreprise est grande, plus elle est prête à avancer sur ces sujets.
C’est intéressant de constater que beaucoup d’administrateurs RH utilisent déjà des outils externes, comme ChatGPT ou Copilot, sans qu’ils soient intégrés dans leur SIRH. Mais attention, ces pratiques comportent des risques en matière de sécurité et de confidentialité.
À l’heure actuelle, le principal processus métier sur lequel ils souhaitent investir avec l’IA, c’est le recrutement : rédaction d’offres, tri et annotation de CV, prédiction du taux de turnover… Les RH se positionnent sur des cas d’usage très concrets.
Chez Cegid, comment intégrez-vous l’IA dans vos solutions RH ?
Nous avons fait le choix d’investir fortement dans les agents IA à travers Cegid Pulse. Et nous avons une forte exigence de pertinence.
Trop de solutions du marché affichaient des fonctionnalités IA sans réelle valeur ajoutée. Nous avons donc rassemblé nos clients pour comprendre leurs besoins et co-construit avec eux des cas d’usage concrets.
Par exemple, sur le recrutement, un recruteur peut accéder à des résumés de CV générés automatiquement en fonction des compétences détectées.
Avez-vous déjà du recul sur certains usages ?
Oui, nos fonctionnalités d’IA sont live depuis l’année dernière. L’un des modules les plus utilisés est celui de la gestion de la performance et des compétences, notamment la fonctionnalité des entretiens annuels.
Ce module intègre aussi des fonctionnalités Cegid Pulse qui permettent, entre autres, d’avoir une véritable conversation manager/managé sans se soucier de prendre des notes ou de la formulation. Une autre fonctionnalité est le celle du référentiel de compétences augmenté par Cegid Pulse…
À partir des données disponibles dans le SIRH (postes, formations, historiques des collaborateurs), l’IA construit un profil de compétences actualisé en continu. C’est une vraie révolution par rapport aux démarches GPEC « traditionnelles ». Le RH garde la main sur la validation des compétences, mais le référentiel devient vivant et dynamique.
Nous remarquons d’ailleurs que ce référentiel est beaucoup utilisé par les managers sur le terrain. Nous avons aussi noté des pratiques particulièrement vertueuses : les managers détectent les écarts de compétences dans leurs équipes et organisent des sessions de mentorat interne pour y remédier.
L’IA est-elle vraiment un « game changer » pour les RH ?
Je le pense, oui. L’IA permet d’aller plus vite, de rendre les processus plus fluides et plus intelligents. Et nos technologies sont matures : elles s’intègrent facilement dans les SIRH existants, sans tout reconstruire.
Mais il faut rester vigilant. Chez Cegid, nous faisons très attention à l’éthique, en particulier aux risques de biais dans le recrutement. L’IA est un accélérateur de transformation à condition qu’elle soit mise au service de cas d’usage concrets, avec une vraie valeur pour les RH et les collaborateurs.