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Le Cercle SIRH : « Un responsable SIRH/SMRH sera perpétuellement en projet »

Par Philippe Guerrier | Le | Sirh saas

Dans un entretien dans le prolongement d’un ouvrage de référence sur les SIRH, Françoise Bragard et Gérard Piétrement précisent la portée de la mutation du SIRH vers l’approche SMRH.

Françoise Bragard, membre du bureau Le Cercle SIRH : les implications du passage du SIRH aux SMRH - © D.R.
Françoise Bragard, membre du bureau Le Cercle SIRH : les implications du passage du SIRH aux SMRH - © D.R.

Après la sortie de son ouvrage collectif «  Des systèmes d’information aux solutions de management des RH » (Editions Vuibert) qui remonte à fin avril 2021, Le Cercle SIRH propose d’approfondir la réflexion à travers cet entretien avec Françoise Bragard et Gérard Piétrement, en qualité de membres du bureau de l’association professionnelle qui rassemble des responsables SIRH dans les organisations.

Ils reviennent notamment sur l’évolution du SIRH vers le SMRH (acronyme de Solutions de Management des Ressources Humaines).

Quels sont les points clés à retenir dans cette mutation SIRH - SMRH ?

Couverture ouvrage SIRH - SMRH - © D.R.
Couverture ouvrage SIRH - SMRH - © D.R.

Les solutions RH s’ouvrent à d’autres publics sur tous les domaines des RH.

  • Aujourd’hui, les salariés qui avaient accès majoritairement à la validation des congés payés, accèderont à leurs entretiens annuels. 
  • Via des systèmes plus évolués, un collaborateur visualisera son chemin de carrière, les compétences à acquérir ou à développer.
  • Le système lui proposera les formations en ligne à suivre.
  • Les managers disposeront d’une vue complète et historique de leurs équipes. Ils seront acteurs dans l’évolution des salaires et des carrières de leurs employés. 

Les solutions RH, et plus généralement les systèmes de paie, se complètent par la gestion des temps et principalement par les suites HCM prenant en charge la gestion des talents, y compris le recrutement. 

Avec les outils satellites comme les outils de gestion de visite médicale ou les organigrammes et les outils de dématérialisation des documents, on peut dire que le spectre est de plus en plus large et complet. 

Les solutions RH seront connectées à d’autres outils RH (internes ou externes) ou non. Dans certains cas, elles utiliseront les technologies d’applications spécialisées, se perfectionneront en se dotant de l’intelligence artificielle dans leurs programmes et/ou en utilisant les « chatbots » pour échanger avec l’ensemble des acteurs. 

De plus, les processus métier occupent une place importante dans un projet SMRH. Une harmonisation des processus sera généralement effectuée avant la mise place d’une nouvelle solution qui pourra apporter une uniformité nationale et/ou internationale et participer à l’ancrage la culture de l’entreprise. 

Enfin, la production d’indicateurs RH impactera d’une manière directe ou indirecte l’efficacité de la fonction RH sur le long terme.

Pour aller plus loin, je vous invite à lire le chapitre 19 « L’évolution du SIRH vers le SMRH » qui détaille l’ensemble de ces éléments.

Comment accompagner la fonction RH dans ce changement de paradigme technologique ?

Ce changement de paradigme est initié le plus souvent par un changement d’outil majeur. La conduite du changement prend alors un sens primordial dans l’accompagnement des RH.

  • Pendant la période du projet, le RH sortira de son environnement opérationnel pour se projeter dans le futur. Il partira de l’analyse de l’existant pour revoir, reconstruire ou bâtir les process qui intégreront l’outil.
  • Pendant la phase de configuration, sa capacité de synthèse et son pragmatisme seront essentiels pour restituer ces pratiques.
  • Lors des tests, il vérifiera l’adéquation entre les process digitalisés et la réalité du terrain en se basant sur des cas réels. Sa capacité de communication et de transmissions de savoirs sera fondamentale pour l’acceptation des utilisateurs finaux.
  • Et pour finir, son support aux utilisateurs lors de la phase de prise en main de l’outil, deviendra son quotidien en complément de ces autres activités. 

C’est pourquoi, pendant toute cette période, un accompagnement soit par de la formation des équipes RH, ou soit par la restitution de témoignages d’autres sociétés ayant déployé ces solutions, devient indispensable.

L’idéal sera une solution basée sur un coaching régulier des équipes RH tout au long de la vie du projet. 

De plus, il est possible que l’équipe RH, ne connaisse pas le mode projet qu’implique le déploiement d’une solution RH majeure. Expliquer le mode projet, son temps, les responsabilités de chacun, l’esprit d’équipe, les contraintes permettront aux RH d’appréhender différemment cette étape qu’ils n’ont peu connue jusqu’à présent sauf dans les équipes de paie où chaque changement de produit est le plus souvent calculé et encadré. 

Désormais, les RH auront désormais accès à une base de données complète et à jour sur de plus en plus de process RH. Certes, la mise à jour de ces données sera de leur ressort. L’analyse de toutes ces données et ces indicateurs et l’élaboration de plus d’actions suivront.

Les RH connaitront aussi une évolution de leurs métiers en accompagnant davantage les salariés et leurs managers dans les carrières et la gestion des équipes. 

De plus, ce changement est à accompagner à un niveau central par les équipes dirigeantes afin qu’il ne soit pas perçu par les collaborateurs et les managers comme un transfert de charges et de responsabilités.

Il est important qu’une plus grande responsabilisation des managers et une plus grande autonomie des collaborateurs soient perçues positivement par les acteurs.

L’intelligence artificielle va-t-elle changer profondément la fonction RH ou la modifier en marge ?

Grâce à l’IA ,le collaborateur sera également plus autonome.

D’une manière générale, l’IA est une aide à la décision, quel que soit le domaine.

Dans le chapitre 15 de l’ouvrage, César Campana a choisi d’axer l’IA appliquée à la gestion des compétences. Ainsi, nous apprenons que l’IA participera à la mise en place du référentiel des compétences et à sa mise à jour régulière.

Dans ce cadre, grâce à son équipe RH, la société :

  • établira une cartographie précise de ces compétences,
  • identifiera les écarts de compétences entre celles dont elle dispose et celles dont elle devrait disposer pour atteindre ses objectifs stratégiques. 

C’est pourquoi l’IA commence à changer progressivement la fonction RH en matière de recrutement et de formation dans les entreprises qui ont opté pour cette gestion des compétences.

Grâce à l’IA, le collaborateur sera également plus autonome dans la connaissance de ces compétences, et dans son choix de carrière (interne ou externe à l’entreprise). D’où un travail plus fin de la fonction RH pour accompagner, fidéliser et retenir ses collaborateurs.

Avec l’essor du télétravail, quelles briques deviennent essentielles pour le pilotage des employés à distance ?

Plusieurs briques deviennent effectivement essentielles pour un pilotage des collaborateurs à distance : 

  • La première brique est la gestion administrative et la mise à jour des données via le self-service. Chaque collaborateur indique au fil de l’eau les changements de ses données personnelles. Les équipes RH les valideront et seront informées des changements très rapidement avec échange ou non des documents déjà dématérialisés. Toute modification contractuelle sera retranscrite dans la solution par le RH.
  • A cette brique de gestion administrative s’ajoute la gestion des temps et des absences. La pose de congés dématérialisée, la consultation en temps réel du solde à jour des RTT, la déclaration d’une absence via un système, deviennent des basiques pour le suivi des présences des collaborateurs.
  • Avec la brique du recrutement : Bien que le salarié ne soit pas présent dans l’entreprise, il a la possibilité de consulter les postes disponibles en interne et d’y postuler.
  • La brique de «  mesure de la performance en continu » facilitera le manager et le collaborateur dans la fixation des activités hebdomadaires et ainsi que leur suivi. A la fin de l’année, la mesure de la performance sera également simplifiée, car il s’appuiera sur le suivi régulier et mis à jour des missions.
  • Avec la brique «  formation », chaque collaborateur pourra accéder à l’historique de ses formations suivies et faire ses demandes en ligne. Certaines formations à distance pourront lui être proposées automatiquement complétées par des évaluations à chaud et à froid.
  • Pour finir, la brique « rémunération » présentera la rémunération complète du salarié et son évolution dans le temps. Ce qui permettra de préparer les revues annuelles des salaires.

Avec le télétravail, les solutions SIRH existantes se connectent de plus en plus avec des applications de « bien-être au travail » ou à d’autres comme pour mesurer l’engagement des collaborateurs (que l’on ne voit plus tous les jours) ou son évolution. 

Le fait de donner accès à ses propres données RH à distance à chaque collaborateur augmentera la sensation de transparence et pourra avoir un effet positif sur la confiance des salariés.

Quelles seront les qualités requises des futurs responsables des projets SIRH dans la configuration SMRH ?

Dans le chapitre 12 de l’ouvrage, François Geuze présente les résultats d’une enquête de référence RH. Cette étude met en avant les qualités requises d’un responsable SIRH du point de vue des compétences transversales, ainsi qu’un ensemble de savoir-faire. 

Les 4 principales compétences transversales en fonction de leur importance relative pour les répondants sont :

  • faire des propositions / alerter ;
  • transmettre et communiquer ;
  • construire des tableaux de bord et des indicateurs ;
  • comprendre le fonctionnement de l’entreprise et du business»
  • gérer un projet. 

La rigueur, le bon relationnel, l’ouverture d’esprit, l’esprit critique et l’esprit de synthèse constituent les 5 premières qualités de « savoir-être » en fonction du nombre de citations spontanées par les interviewés. 

François Geuze complète son approche par différents éléments, dont les principales missions et activités, les compétences, les rémunérations et parcours de carrière et les perspectives.

Dans une configuration SMRH, et d’après les compétences décrites par François Geuze, je retiendrai les qualités suivantes :

Les visions stratégiques et opérationnelles

Une solution SIRH est mise en place pour répondre aux enjeux de la fonction RH qui s’inscrivent dans un plan stratégique d’entreprise. Avoir une bonne compréhension de ces enjeux ainsi qu’une vision globale est primordial pour mettre en place et maintenir une solution qui répond aux besoins de l’entreprise et à son évolution.

Le management de projet

C’est une qualité qui est requise à chaque moment. Après le déploiement de la solution arrive la phase de RUN qui s’accompagne généralement d’évolutions. Il y aura aussi la connexion aux différentes applications…Un responsable SIRH/SMRH sera perpétuellement en projet

L’appétence pour conduire le changement

Les solutions que nous gérons nécessitent un accompagnement ciblé par de la formation, par de la communication spécifique et aussi une analyse détaillée des impacts organisationnels ou autre qu’ont ces solutions sur le travail des RH, des managers et des collaborateurs. Il en va de l’adoption et de l’utilisation de ces outils.

La mise en place de ces outils est généralement onéreuse, et mobilise de nombreux acteurs. Le fait qu’il ne soit pas utilisé serait un échec à plusieurs niveaux de l’entreprise.

Etats Généraux du SIRH : la troisième édition en visioconférence en octobre

Les troisièmes Etats Généraux du SIRH « État de l’art, nouveautés et limites » seront organisés le 7 octobre 2021 entre 17H00 et 18H30 en visioconférence.

Ils se dérouleront en trois séquences : 

• 17h00-17h30 : résultats du benchmark SIRH 2021,
• les dernières innovations technologiques,
• les Data du SIRH, archivage, anonymisation et leur impact.