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OCTO Technology : « Nous n’avons pas fait appel du tout au dispositif de chômage partiel »

Par Philippe Guerrier | Le | Bien-être au travail

Nathalie Avramesco, DRH d’OCTO, évoque la manière dont le cabinet de conseil spécialisé dans la transformation digitale a abordé le virage du confinement et du télétravail à grande échelle.

Nathalie Avramesco, DRH d’OCTO : interview spécial Covid-19 - © D.R.
Nathalie Avramesco, DRH d’OCTO : interview spécial Covid-19 - © D.R.

OCTO Technology est un cabinet de conseil et de réalisation IT, qui fait partie d’Accenture Digital. Ancré dans la transformation digitale des organisations, il dispose d’un effectif global de 650 collaborateurs répartis entre le siège basé à Paris, trois bureaux en région (Aix-Marseille, Lille et Toulouse) et une succursale au Maroc et revendique un rythme annuel de 1300 missions.
Comment OCTO s’est-il organisé pour poursuivre son activité sur fond de confinement et donc de télétravail ? Exclusive RH propose un extrait de l’interview de Nathalie Avramesco, DRH d’OCTO, en partenariat avec News Tank RH.

Comment avez-vous abordé le virage du confinement chez OCTO Technology ?

Début mars, nous avons commencé à mettre en place une équipe sous forme de cellule de crise baptisée Fast Lane (« voie rapide sur une autoroute » en anglais), qui se réunit à un rythme de trois fois par semaine une demi-heure à chaque fois avec l’ensemble des acteurs qui peuvent être partie prenante sur le sujet. 

La cellule regroupe toutes les personnes ayant une bonne vision de la situation et susceptibles de prendre les décisions nécessaires.

Elle comporte une personne qui supervise la partie « delivery » des consultants, celle qui s’occupe des services généraux, le DSI, un responsable commercial et relations clients, la directrice des opérations, la responsable staffing et moi-même. 
Nous avions commencé à préparer le télétravail pour tous quelques jours avant l’annonce du confinement et décidé de fermer les locaux de la société en conséquence à partir du lundi soir [16 mars 2020]. Nous avons mis quasiment tout le monde en télétravail de manière immédiate. Chaque collaborateur est équipé d’un téléphone mobile et d’un ordinateur portable. Notre population est déjà habituée à effectuer du télétravail. Il a fallu prendre en compte des cas spécifiques d’accès informatique chez des clients pour des raisons de sécurité.
Au sein d’OCTO, nous ne disposions pas d’un plan global de continuité d’activité finalisé. Nous l’avions ébauché depuis le début de l’année.

Dans quelle mesure avez-vous procédé à des réaménagements d’équipes avec la crise ?

Nous n’avons pas fait appel du tout au dispositif de chômage partiel. Nous nous estimons plutôt chanceux. Comme tout le monde, nous vivons un décrochage de nos activités, mais je trouve que nous sommes relativement épargnés par rapport à d’autres acteurs. En termes de responsabilité sociétale qui est très présente chez OCTO, nous avons estimé que ce n’était pas envisageable d’adopter le chômage partiel. Nous pensons que d’autres entreprises dans d’autres secteurs - mais aussi dans le nôtre - avaient davantage besoin du soutien de l’Etat.

Nous acceptons de payer nous-mêmes le coût lié à la non-occupation de certaines ressources.

Certes, nous avons davantage de consultants en inter-contrats qu’en période classique et nous allons les occuper au mieux pendant cette période. Il s’agit de capitaliser sur un certain nombre de choses et de travailler sur des sujets qui permettront de repartir plus fort lorsque la relance des activités surviendra. Notre pari n’est pas de dire que nous allons avoir besoin de toutes nos salariés immédiatement. Comme tous les acteurs économiques, nous n’avons guère de visibilité sur ce qui va se passer dans les prochains mois.

Nous n’avons pas non plus procédé à des réorganisations importantes des équipes déjà en mode projet. En revanche, nous avons renforcé nos pratiques managériales pour s’assurer que les salariés vont bien.

Nous avons une culture du partage très forte entre salariés par le biais de mailing-lists ou de retours d’expérience par exemple et une forte proximité entre managers et collaborateurs avec une culture d’entreprise peu hiérarchisée.
L’une des principales pratiques managériales s’appelle O3 (« One on One ») : chaque salarié dispose d’une demi-heure d’échange par semaine avec son manager, totalement consacré au salarié, pour savoir comment il va, discuter des missions et du suivi des projets.
Peu de salariés ont été atteints du Covid-19. En l’état actuel, nous avons eu sept salariés en arrêt maladie pour ce motif.

Avez-vous observé des cas de risques psychosociaux depuis le démarrage du confinement ?

Nous avons diffusé aux managers des guidelines sur la manière d’adapter leurs pratiques managériales au contexte, et organisé un webinaire avec une psychologue d’un cabinet de coaching avec lequel nous travaillons régulièrement. L’objectif est d’identifier les salariés mal à l’aise dans ce contexte de confinement et d’apporter les réponses adéquates à la situation de détresse. Et nous avons fait une autre version de ce webinaire destiné à tous les salariés.

Nous avons identifié un risque de surinvestissement chez certains salariés.

Des développeurs passionnés par le code avaient contacté leurs managers pour poursuivre leur travail le week-end. J’ai envoyé un e-mail à l’ensemble des salariés pour leur demander de souffler le week-end, car nous sommes probablement partis pour un marathon.
Début avril, nous avons aussi lancé un « mood meter » sous forme d’un questionnaire en ligne pour évaluer le moral des collaborateurs. C’est un outil facultatif pour avoir une vision collective et repérer les éventuelles personnes ayant besoin de soutien. Nous lançons la deuxième vague de ce questionnaire.

Comment allez-vous exploiter cette période pour développer la formation ?

Certaines formations qui se déroulent habituellement en présentiel ont pu être adaptées en distanciel, mais ce n’est pas le cas pour toutes. Nous mettons également beaucoup l’accent sur des formations certifiantes en ligne, dans le cadre de partenariat avec des éditeurs notamment.
Un certain nombre de collaborateurs avaient l’habitude de suivre des conférences nationales ou internationales en fonction de leurs expertises techniques. Ces événements ont tous été annulés par leurs organisateurs, compte tenu du contexte.

Comment gérez-vous les recrutements en cours ?

Pour les candidats en cours de process, nous allons jusqu’au bout de la démarche. Nous leur faisons une proposition d’embauche mais sans s’engager sur une date ferme d’arrivée pour l’instant. Nous avons une spécificité chez OCTO : nous ne recrutons que sur profil mais pas sur mission pour nos consultants. Nous prenons en compte les besoins globaux des clients comme les profils de développeurs, de data scientists ou d’autres expertises technologiques.

La croissance moyenne de notre effectif est de 20 % par an et nous restons sur cette tendance-là.

Nous venons de faire le point avec les différentes « tribus » (équipes auto-organisées) sur les besoins en expertise et en recrutement. Nous observons que la plupart des candidats ont plus de temps de répondre qu’avant, car nous recevons davantage de réponses (positives ou négatives) et une population hyper sollicitée en temps normal semble plus à l’écoute de ce qui se passe sur le marché.

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