Qvt

Deliveroo France condamné pour travail dissimulé : des réactions en chaîne sur un débat vif

Le | Bien-être au travail

Deliveroo a été condamnée par la justice française à une amende de 375 000 euros pour travail dissimulé dans la période 2015-2017. La plateforme de livraisons de repas envisage de faire appel.

Travailleurs et plateformes : Deliveroo condamné pour travail dissimulé sur la période 2015-2017 - © D.R.
Travailleurs et plateformes : Deliveroo condamné pour travail dissimulé sur la période 2015-2017 - © D.R.

Le statut des travailleurs des plateformes continue de faire des vagues…Le 19 avril, le tribunal correctionnel de Paris a condamné Deliveroo France pour « travail dissimulé » entre 2015 et 2017.

Plusieurs sanctions sont tombées à l’encontre de la société qui exploite une plateforme de livraison de repas en faisant appel à des livreurs : 

  • amende de 375 000 euros,
  • condamnation de deux anciens dirigeants à 12 mois de prison avec sursis,
  •  50 000 euros de dommages et intérêts à chacune des cinq organisations syndicales de salariés   qui s’étaient portées parties civiles pour « préjudice moral » : CGT, Union Solidaires, SUD-Commerces et services, SUD-Commerces et services Île-de-France et le Syndicat national des transports légers.

Selon la justice française, l’organisation mise en place par la branche française de Deliveroo dans la période 2015 - 2017 constituait une atteinte volontaire au droit du travail, par l’utilisation de milliers de coursiers officiellement indépendants mais, en réalité, subordonnés à la plateforme. 

Ces livreurs « ne constituaient qu’une variable d’ajustement permettant de disposer d’une flotte adaptée et réactive face au nombre de commandes enregistrées chaque jour. Seule la très grande flexibilité générée par les pratiques délictuelles commises et imposée assurait la pérennité du modèle », estime le tribunal correctionnel de Paris.

Deliveroo est également obligé d’afficher sur la page d’accueil de son site Internet l’information suivante portée au grand public : « Par jugement en date du 19 avril 2022, la SAS Deliveroo France, prise en la personne de ses représentants légaux entre avril 2015 et décembre 2017, a été condamnée pour le délit de travail dissimulé au paiement d’une amende délictuelle de 375 000 euros et à indemniser au titre des préjudices subis les livreurs qui se trouvaient être en réalité ses salariés. »

Parallèlement, la première élection des représentants des travailleurs des plateformes aura lieu du 9 au 16 mai 2022. 100 000 travailleurs des plateformes de livraison et du secteur des VTC sont concernés par ce scrutin.

Condamnation de Deliveroo pour « travail dissimulé » : les réactions 

Deliveroo : « Une décision difficile à comprendre » (Deliveroo)

« Cette décision est difficile à comprendre dans la mesure où elle fait suite à six décisions favorables des juridictions civiles portant sur les mêmes années, 2015 à 2017, sur lesquelles le tribunal s’est penché. De plus, la décision rendue porte sur le modèle de Deliveroo des débuts, et n’a pas de conséquences sur la manière d’opérer aujourd’hui. Nous envisageons de faire appel lorsque nous aurons pris connaissance de l’intégralité du jugement. »

CGT : « Une victoire pour les travailleurs »

« La CGT, partie civile aux côtés des livreurs dans ce procès, se félicite de cette victoire pour les travailleurs. La lutte contre l’ubérisation précarisant les travailleurs doit continuer. Le gouvernement doit prendre toute la mesure de cette condamnation et faire appliquer le droit français et européen, notamment en favorisant et en transposant dans le droit interne le projet de directive sur la présomption de salariat. Il s’inscrira ainsi dans un mouvement se déployant dans plusieurs États : Espagne, Royaume- Uni, Italie… qui vise à mettre fin aux dérives de l’ubérisation, en régulant le statut des plateformes. »

FEPS : « Le portage salarial, unique solution pour sécuriser la relation contractuelle entre plateformes et travailleurs »

« Ce jugement intervient seulement quelques jours après l’annonce faite par Just Eat France du licenciement de 269 livreurs en CDI pour n’en conserver que 530, bien loin des 4500 emplois promis en 2021. Face à la pénalisation inédite de l’activité des plateformes de la mobilité et à l’échec de l’alternative du CDI pour tous, leur existence est plus que jamais menacée », estime la Fédération des Entreprises de Portage Salarial. 

« Dans ce contexte, la FEPS se mobilise pour la sauvegarde des près de 200.000 emplois du secteur en proposant aux pouvoirs publics d’expérimenter l’ouverture du portage salarial aux travailleurs des plateformes. »

CLAP75 : satisfaction après la décision de justice

Le Collectif des Livreurs Autonomes de Plateformes, dédié à la défense des livreurs « auto-entrepreneurs », s’est exprimé sur Twitter avec l’annonce de la décision de justice.