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Licenciement pour faute grave : les 5 points de vigilance

Par Philippe Guerrier | Le | Législation paie

La procédure juridique de licenciement pour faute grave est sensible. Elle est encadrée et nécessite une certaine dose de compréhension contextuelle et de rigueur par l’employeur dans les démarches à suivre.

Licenciement pour faute grave : les 5 points d’attention qui nécessitent de la vigilance - © D.R.
Licenciement pour faute grave : les 5 points d’attention qui nécessitent de la vigilance - © D.R.
  • État d’ivresse pendant les heures de travail ;
  • Absences non justifiées ou abandon de poste ;
  • Indiscipline ou insubordination du salarié ;
  • Harcèlement, violences ou insultes envers l’employeur ou d’autres collaborateurs ;
  • Vols en entreprise.

Autant de situations qui peuvent aboutir à un licenciement pour faute grave, selon les exemples fournis par le portail Service-Public.fr. C’est la jurisprudence de la Cour de cassation, qui nous permet de dire ce que l’on doit considérer comme une faute grave et si un licenciement pour faute grave est justifié.

Pour la Cour de cassation « la faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise » (Cour de cassation, 27 septembre 2007, N° : 06-43867). Ce mode de rupture du contrat de travail entraîne donc le départ immédiat du salarié. Il n’y a pas de préavis. Néanmoins, l’employeur doit respecter la procédure de licenciement pour motif personnel.

Faute grave : le contexte à saisir

L’employeur doit appréhender les circonstances et apprécier la gravité des faits reprochés au salarié. Le licenciement peut être enclenché de manière soudaine : la faute grave peut être reconnue, même si la faute est commise pour la première fois.

Chaque situation est unique et nécessite d’être bien analysée pour que la décision soit pertinente : la faute grave est le résultat d’un fait ou d’un ensemble de faits qui constituent une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail.

Il existe d’autres éléments d’appréciation à prendre en compte : 

  • Un même fait ne peut pas être sanctionné deux fois sous des formes différentes (un avertissement lancé initialement puis un licenciement pour faute grave) ;
  • Il faut toujours regarder si la convention collective prévoit des dispositions particulières concernant la procédure de licenciement ;
  • La procédure de licenciement ne doit pas être vexatoire. Par exemple si un employeur évoque les motifs de licenciement à voix haute, en public, en dénigrant le salarié devant ses collègues. Dans ce cas, il est possible que le salarié mis en cause puisse obtenir des dommages-intérêts en cas de recours. 

Le licenciement pour faute grave en 5 phases

Etablir la faute grave

L’employeur doit justifier ce qu’il reproche au salarié. C’est à lui de rassembler des preuves et de constituer un dossier intégrant des éléments à charge sur les faits reprochés : attestations, courrier professionnel, réclamations clients, photos, vidéos, conservation téléphoniques enregistrées dans le cadre de son activité professionnelle…

Néanmoins, l’employeur ne doit pas dépasser les limites de la sphère de la vie personnelle pour monter le dossier à charge.

Activer la procédure dans un délai court

Selon l’article L. 1332-4 du Code du Travail, une procédure de licenciement pour faute grave ne peut pas être enclenchée au-delà de 2 mois après le constat de cette faute.

Elle doit être activée « à partir de la connaissance des faits par l’employeur » et, si possible, dans les jours qui suivent les faits reprochés.

Pour le point de départ du délai de prescription de 2 mois, l’employeur peut être le supérieur hiérarchique du salarié, même si celui-ci n’a pas de pouvoir disciplinaire.

Le salarié reçoit une convocation à l’entretien préalable au licenciement. Il lui est notifié simultanément une mise à pied à titre conservatoire (automatique compte tenu de l’impossibilité de maintenir le salarié dans l’entreprise), qui suspend immédiatement l’exécution du contrat de travail et le versement de son salaire.

Organiser un entretien préalable à un licenciement

A charge pour l’employeur d’exposer les raisons qui le poussent à envisager un licenciement. Mais il n’est pas obligé d’indiquer à ce stade que sa décision est prise ou de montrer les preuves dont il dispose. Néanmoins, il peut demander l’appui d’un témoin des faits reprochés ou du DRH.

Le salarié mis en cause peut fournir des explications pour sa défense. Lors de cet entretien préalable, le salarié peut se faire assister par un autre salarié ou un représentant du personnel.

Notifier le licenciement

La lettre de licenciement est obligatoirement envoyée par recommandé avec accusé de réception. Le courrier ne peut pas être envoyé moins de deux jours ouvrables après la tenue de l’entretien préalable.

La lettre comporte les motifs du licenciement pour faute grave avec les éléments les plus factuels possibles.

L’article L. 1332-2 du Code du Travail ajoute que le licenciement pour faute grave ne peut pas intervenir plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien préalable.

Gérer les formalités administratives et les indemnités de rupture de contrat

Dans ce contexte, le salarié licencié pour faute grave ne peut pas se voir attribué une indemnité de préavis (article L. 1234-5 du Code du Travail) ou une indemnité de licenciement (article L. 1234-1 du Code du Travail).

L’employeur devra établir son solde de tout compte, intégrant le montant de son indemnité compensatrice de congés payés si les conditions sont remplies. 

Dans l’accompagnement administratif, le salarié peut bénéficier de la portabilité de ses droits à la formation et de sa prévoyance complémentaire. Un certificat de travail et une attestation Pôle emploi lui seront transmis afin de percevoir l’allocation chômage.

La subtilité de la « faute »

La dimension de faute grave pour un licenciement évolue en fonction de la jurisprudence de la Cour de cassation.

La notion de faute n’est pas à prendre à la légère : elle est à nuancer au regard des dossiers sensibles évoqués dans la vie professionnelle. Il peut survenir un licenciement pour faute simple, grave ou lourde, au terme d’une procédure disciplinaire.

Les conséquences du licenciement varient en fonction de la qualification retenue par l’employeur. En cas de litige, c’est au juge de déterminer la nature de la faute commise (simple, grave ou lourde).

Concepts clés et définitions : # Licenciement