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Quel est le poids des DRH dans les Codir ?

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En France, la quasi-totalité des DRH d’entreprises françaises de plus de 200 salariés siègent au comité de direction. L’enjeu n’est donc plus vraiment de s’interroger sur leur place au sein des instances décisionnelles mais de questionner leur rôle. Le DRH a-t-il réellement du poids dans les orientations stratégiques de son entreprise ? Ou sa présence est-elle surtout symbolique 

Quel est le poids des DRH dans les Codir ? - © D.R.
Quel est le poids des DRH dans les Codir ? - © D.R.

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Des chiffres en trompe l’œil 

Dans son rapport CRANET de 2014 piloté en France par l’EM Lyon (et non réédité depuis), l’Observatoire européen des politiques et pratiques de gestion des ressources humaines observe que le responsable RH a un fauteuil au comité de direction des organisations dans 91 % des cas. Ce chiffre est d’ailleurs stable depuis 2005, après avoir lentement progressé depuis le milieu des années 90. « Quand on est une organisation respectable aujourd’hui, le DRH est au Codir ; c’est presque une question d’affichage. Le tout est de savoir le rôle qu’il y joue. Et là, je serais plus mesurée », analyse Fabienne Autier, doyenne associée à la faculté de l’EM Lyon et professeure en gestion des RH. Elle rappelle d’ailleurs que l’augmentation de la présence des DRH au Codir ces 20 dernières années est allée de pair avec une décroissance des effectifs globaux dédiés à la fonction.

Le DRH est audible… quand tout va bien

« Les Codir restent focalisés sur la dimension ‘business’ et sur les résultats financiers », reconnaît Jean-Paul Charlez, Président de l’ANDRH et DGRH du groupe Etam. Un constat corroboré par Barbara, responsable du recrutement et du développement RH dans une grande entreprise du retail. « Quand j’ai pris mon poste, la période était prospère. Nous avions des dispositifs pour faire monter les collaborateurs en compétences et pour travailler sur les parcours de carrière. Quelques mois plus tard, la situation s’est dégradée. Le Codir a immédiatement coupé les budgets de formation et d’intégration et plusieurs DRH se sont succédés en quelques mois. Aujourd’hui, il y a un écart croissant entre le discours porté sur notre politique RH et les moyens dont on dispose », explique-t-elle. La voix des RH au Codir porte-t-elle uniquement quand tous les indicateurs financiers sont au vert ?  « Le DRH est surtout là pour s’assurer qu’il n’y a pas de contre-indication majeure à la prise d’une décision business et pour mesurer le risque associé ; il est rarement proactif… sauf peut-être sur les sujets autour de la qualité de vie au travail et des questions qui relèvent du marketing social », abonde Fabienne Autier. 

Le sage du Codir 

Reste que, pour Jean-Paul Charlez, c’est justement ce rôle de contradicteur qui permet au DRH d’exercer une influence sur les décisions. A condition de faire valoir son indépendance vis-à-vis des seuls intérêts de l’entreprise. « Nous devons nous comporter dans le respect des intérêts des salariés. Être DRH, c’est un plaisir solitaire. On ne s’attend pas à avoir de retours positifs de nos collègues. On est plutôt des self-motivated achievers », explique-t-il. D’ailleurs, la bataille ne se joue pas forcément lors des réunions formelles. « Les patrons ont compris que les DRH leur sont indispensables. Ils se voient souvent en bilatéral car tous les sujets RH ne peuvent pas être soulevés en Codir. Mais cela fonctionne uniquement quand le DRH et le DG forment un vrai binôme », observe le Président de l’ANDRH.

Business partner, Human partner 

Si les DRH se sont fait une place au Codir, c’est aussi grâce à la fameuse posture de « business partner » que beaucoup d’entre eux ont essayé d’adopter. « Concrètement, business partner, ça veut dire « business first ». La fonction RH n’est alors que le bras armé des managers pour les aider à déployer les décisions business sur le terrain. C’est encore rarement le DRH qui impulse des projets de développement de nouvelles compétences qui permettraient à l’entreprise de se lancer sur de nouveaux marchés« , observe Fabienne Autier. Dans l’entreprise de Barbara, l’organisation en réseau avec des responsables RH de proximité, est d’ailleurs remis en question. 

Le DRH est-il voué à garder sa place de docteur honoris causa au comité de direction ?  »Les choses évoluent. Dans mon groupe, le quart de la rémunération variable des membres du Codir dépend du développement de leur équipe - et donc de la performance non-financière de l’entreprise", conclut Jean-Paul Charlez.

Gaëlle Fillion