Du pass sanitaire au pass vaccinal : vers une contribution plus intense des entreprises ?
Par Philippe Guerrier | Le | Bien-être au travail
Face à la nouvelle vague de la Covid-19 (variants Delta et Omicron), le Premier ministre Jean Castex veut transformer le pass sanitaire en pass vaccinal et éventuellement mettre la pression sur les entreprises.
Comment transformer le pass sanitaire en pass vaccinal ? Et comment le monde du travail doit s’adapter à la nouvelle donne ?
Le gouvernement planche sur ces deux sujets.
- Pour la première interrogation, un projet de loi est d’ores et déjà programmé au Parlement pour début janvier 2022 en vue d’une adoption à la fin de ce même mois.
- Pour la seconde, Élisabeth Borne, ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, discute à partir de lundi (20 décembre) avec les partenaires sociaux d’une possibilité de généralisation du passe sanitaire, en guise de concertations préalables.
Vaccination : fermeté du gouvernement
On l’a compris : le gouvernement ne veut pas perdre de temps malgré les fêtes de fin d’année. Vendredi soir (17 décembre), le Premier ministre Jean Castex a fait le point sur les nouvelles mesures à prendre contre la cinquième vague Delta et l’arrivée du variant Omicron « à la vitesse fulgurante » sur fond de pandémie Covid-19.
Dans une déclaration officielle adressée le vendredi 17 décembre après un conseil de défense sanitaire, il a souligné l’importance de la « vaccination avec 3 doses désormais ».
Le ton du gouvernement se veut plus ferme. « Parce qu’il n’est pas admissible que le refus de quelques millions de Français de se faire vacciner mette en risque la vie de tout un pays et entame le quotidien d’une immense majorité de Français qui a joué le jeu depuis le début de cette crise, nous avons décidé avec le Président de la République qu’un projet de loi sera soumis au Parlement début janvier, notamment pour transformer le pass sanitaire en pass ‘vaccinal’ et durcir les conditions de contrôles et de sanction contre les faux pass », a déclaré Jean Castex.
Possibilité d’extension du pass sanitaire en entreprise : le gouvernement cherche ses marques
Invité le 18 décembre sur France Inter, Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, affine la vision et voudrait « transformer le pass sanitaire en pass vaccinal dans les trains et les avions et de se poser la question d’un pass sanitaire pour aller travailler. »
Il précise : « C’est une question légitime qui est d’ailleurs appliquée chez certains de nos voisins, les Allemands ont le fameux pass 2G (« vacciné ou guéri ») et le pass 3G (« vacciné ou guéri ou testé »). On ne peut pas empêcher les gens d’aller travailler s’ils ne sont pas vaccinés mais on peut exiger d’eux qui passent un test s’ils ne sont pas vaccinés. Cela fait partie des questions qui doivent être posées.»
Cette question sera abordée dans le cadre des discussions autour du prochain projet de loi, assure les services du Premier ministre. Même si, de son côté, Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, a temporisé le lendemain (19 décembre) dans une intervention sur LCI : « Il y a une hypothèse, une possibilité d’extension du pass à d’autres lieux de travail, mais ce n’est pas aujourd’hui dans notre scénario de travail. »
« L’ensemble de la sphère professionnelle est concerné mais rien n’est tranché à ce stade. La ministre de la transformation et de la fonction publique mènera également des consultations de son côté », indique de son côté le ministère du Travail.
Le Medef a le sentiment que le gouvernement « reporte l’obligation vaccinale sur l’entreprise »
En guise de premières réactions du côté des organisations patronales, Patrick Martin, Président délégué du Medef, se montre réservé. « D’une certaine manière, l’Etat reporte sur les chefs d’entreprise une décision ou des mesures qu’il ne veut pas prendre lui-même à titre général, c’est-à-dire l’obligation vaccinale », déclare-t-il sur Franceinfo le 19 décembre. « Est-ce aux chefs d’entreprise d’exercer d’une certaine manière des pouvoirs de police en s’exposant à des peines très lourdes ? », interroge-t-il.
Néanmoins, il laisse aussi des possibilités d’adaptation. « On sera évidemment constructif. Mais ne faisons pas porter à l’entreprise le chapeau de politiques publiques qui sont nécessaires, mais qui ne sont pas forcément de sa responsabilité ».
Pour sa part, François Asselin, président de la Confédération des Petite et Moyennes Entreprises (CPME), déclare parallèlement à Franceinfo qu’il reste ouvert à la discussion sur le sujet.
« C’est quelque chose qui existe déjà dans d’autres secteurs d’activités qui reçoivent du public, comme dans les restaurants, et ça fonctionne techniquement. Après, c’est une question d’ordre personnel. Ce que nous craignons le plus, c’est d’être reconfiné, et s’il faut en passer par un pass vaccinal, pourquoi pas. »
Il ajoute : « Le pass vaccinal est la première incitation, c’est une vraie contrainte. Ajouter ce contrôle au sein de l’entreprise est une incitation supplémentaire. »
Pass sanitaire : les travailleurs en contact avec le public en première ligne
• En l’état actuel, le pass sanitaire est déjà obligatoire pour les travailleurs tous statuts confondus (salariés, bénévoles, prestataires, intérimaires, sous-traitants) dans les secteurs en contact avec le public au sens large : restauration, hôtellerie, établissements de santé et médico-sociaux, trains grandes lignes. Ainsi, depuis le 30 août 2021, le pass sanitaire était obligatoire au travail pour 1,8 million de salariés et apprentis.
• Les établissements concernés par l’obligation vaccinale sont ceux listés au I de l’article 12 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire et à l’article 49-2 du décret du 1er juin 2021.
• L’obligation de présentation du pass sanitaire est applicable aux mineurs de plus de 12 ans depuis le 30 septembre 2021.
• Au niveau européen, un passe sanitaire est exigé dans le cadre professionnel en Italie et en Allemagne depuis l’automne 2020.