Etude IDC-Deel : l’IA impacte la gestion RH, un sujet inspirant pour Cédric Villani
24 % des entreprises françaises ont lancé des « restructurations significatives » pour intégrer l’IA à leurs process, selon une étude IDC - Deel. Jeremy Mimoun, responsable France de Deel, a présenté les résultats avec Cédric Villani, mathématicien, lauréat 2010 de la médaille Fields et expert de l’IA.
Devant un parterre de DRH et de responsables RH & Tech réunis lors d’un récent event parisien, Deel France a présenté l’étude « The Role of AI in the Global Workforce » avec l’intervention d’une personnalité extérieure du très volubile Cédric Villani.
Ce mathématicien notoire, lauréat 2010 de la médaille Fields, est également l’auteur du rapport « Donner un sens à l’intelligence artificielle : pour une stratégie nationale et européenne » publié au nom du Gouvernement en mars 2018 alors qu’il occupait le mandat de député de la 5e circonscription de l’Essonne.
Il a capté l’attention de l’assistance en partageant sa vision de l’IA face aux mutations du travail, en particulier sur le recrutement, avec l’appui de Jeremy Mimoun, responsable France de Deel, récemment interviewé sur RH Matin pour faire le point sur les activités et le business en France.
Les multiples impact de l’IA en entreprise
« Avec l’impact de l’IA, il y a une dynamique de changement avec des rôles qui apparaissent comme AI Engineer, Prompt Engineer ou AI Data Quality Analyst et dans la façon de percevoir les soft skills. De cette étude, il ressort plusieurs choses en lien :
- 8 entreprises sur 10 observent des transformations ou suppressions de postes,
- 2 entreprises sur 3 prévoient de ralentir les recrutements de profils juniors,*
- 2 entreprises sur 3 investissent dans la formation à l’IA », déclare Jeremy Mimoun.
Parmi les autres points saillants :
- 3 % des entreprises françaises ont déployé des équipes transverses dédiées à la montée en compétences en IA ;
- 35 % admettent ne pas savoir qui pilote vraiment cette transformation en interne.
Impact IA sur le recrutement
Sur le focus France, l’étude IDC-Deel indique que les entreprises :
- à 83 % observent des transformations ou suppressions de postes en lien avec l’IA,
- à 67 % prévoient de réduire leurs recrutements de profils juniors d’ici trois ans,
- à 62 % d’entre elles déclarent investir activement dans la formation à l’IA, afin de faire évoluer leurs équipes et sécuriser leur compétitivité.
Du côté des dirigeants d’entreprise français :
- 75 % d’entre eux reconnaissent qu’il devient plus complexe de recruter et de former les futurs leaders, faute de parcours d’apprentissage adaptés aux nouveaux enjeux.
- 70 % constatent une raréfaction des opportunités de formation « sur le terrain ».
IA : les obstacles au déploiement
Côté collaborateur
Les entreprises françaises décrivent plusieurs obstacles qui freinent le déploiement de l’IA :
- 55 % évoquent un manque d’engagement des collaborateurs ;
- 50 % évoquent des contraintes budgétaires ;
- 57 % évoquent la difficulté de trouver des formateurs qualifiés.
Tension sur les profils IA
- 49 % des entreprises françaises évoquent des freins au recrutement aux profils spécialisés IA à cause de l’état de leurs infrastructures IT ;
- 45 % évoquent une pénurie de talents IA ;
- Presque 50 % des entreprises sont prêtes à offrir aux experts IA des salaires 25 à 100 % supérieurs à ceux des autres postes techniques.
IA et compétences
Trois compétences sont appréciées par les entreprises à propos de l’IA :
- 64 % évoquent les certifications techniques ou bootcamps en IA ;
- 59 % évoquent la pensée critique et résolution de problèmes ;
- 50 % des compétences en communication et collaboration.
Dans le processus de recrutement, 4 % des entreprises françaises considèrent un diplôme universitaire comme essentiel pour les postes juniors.
« L’IA transforme notre manière de travailler et le fonctionnement des entreprises. Les emplois de début de carrière évoluent, tout comme les compétences recherchées par les entreprises. Les salariés et les employeurs doivent s’adapter rapidement. Il ne s’agit plus seulement de rester compétitif, mais de rester pertinent », indique Jeremy Mimoun.
Cédric Villani : « L’humain est mauvais en recrutement, autant automatiser la tâche »
En qualité de personnalité invitée à l’événement de Deel, Cédric Villani a évoqué sa vision de l’IA face aux mutations du travail, en particulier sur le recrutement.
- « Les sociologues et les philosophes nous ont appris qu’en tant qu’humains, nous sommes globalement mauvais en recrutement et en gestion de carrière. Je vous recommande l’éclairant chapitre qui est consacré à ce sujet dans le célèbre ouvrage “Système 1/Système 2” paru en 2011 de Daniel Kahneman, un spécialiste des biais cognitifs à qui l’on a attribué le Prix Nobel d’Économie en 2002. Ses travaux réalisés avec Amos Tversky [ndlr : décédé en 1996] sont restés une référence à la matière.
- Daniel Kahneman raconte comment, alors qu’il était universitaire et chargé d’évaluer les recrues de l’armée israélienne, il a pris conscience qu’il était mauvais pour recruter les élèves. A fortiori, les élèves qu’il avait recrutés n’étaient pas bons, du moins pas ceux en qui il croyait. Il en conclut qu’il vaut mieux automatiser cette tâche, tout en ayant du mal à convaincre ses collègues. Cela fait partie des sujets où précisément l’algorithme peut faire beaucoup de bruit. Cela fait partie de l’histoire de l’IA : les humains se croient très bons sur certains sujets mais découvrent au final qu’ils sont mauvais. Parfois, ce n’est pas grave, mais parfois on s’en passerait bien.
Quel que soit le projet, que ce soit dans les RH ou dans un autre, il existe une méthode expérimentale pour tirer profit de l’IA :
- se demander qui on est et ce que l’on veut faire (quels sont les grands objectifs ?),
- phosphorer pour identifier tous les cas d’usage dans lesquels le recours à l’automatisation pourrait aider.
- trouver le partenaire de confiance. L’IA se fait sans arrêt dans un partage de compétences entre l’usager et le développeur, et plus que n’importe quelle autre technique ou technologie que j’ai pu connaître dans ma carrière ou analyser à la présidence de l’OPECST.
- se lancer dedans dans une boucle de rétroactions avec des essais et des expériences sur la durée et en confiance. »
Méthode de l’étude IDC - Deel
• Panel de 5500 entreprises
• 22 marchés couverts : Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chili, Chine, Colombie, France, Allemagne, Hong Kong, Inde, Israël, Japon, Corée du Sud, Mexique, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Singapour, Espagne, Suède, Royaume-Uni, États-Unis.
• Approche multisectorielle : banque, éducation, services financiers, secteur public, santé, hôtellerie, assurance, industrie, médias, services professionnels, RH, commerce de détail, technologie, télécoms, transports, logistique, services publics.
• Collecte de données réalisée en septembre 2025.
(Adaptation d’un article publié sur News Tank RH le 10 décembre 2025)
Concepts clés et définitions : #DRH ou directeur des ressources humaines